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La rédaction de Gestions hospitalières avait prévu pour son numéro de mars un dossier autour de la naissance. L’actualité sanitaire de nos hôpitaux et la mise à l’arrêt de la production matérielle nous obligent à nous adapter. Ce numéro sera ainsi diffusé via notre site Internet avant de pouvoir être imprimé, quand l’hôpital aura repris son cours quotidien. 

Ces moments sont difficiles à vivre et à penser. Pourtant, il existe une proximité entre ce que traverse aujourd’hui l’hôpital et la naissance. En effet, la naissance est un phénomène de la vie qui ne peut se réduire à l’emprise de la technique médicale, à la volonté de la contrôler, à l’appréhender de toute manière. La naissance est imprévisible au sens où elle reste un miracle, ce qui est toujours inattendu, radicalement nouveau. Et nous sommes capables d’accueillir ce bouleversement improbable.

L’hôpital aussi est imprévisible. Malgré les immenses progrès de la science, malgré notre volonté gestionnaire d’en maîtriser toutes ses composantes pour les ramener sous l’œil de la raison, l’objet de l’hôpital nous échappe : le soin, la santé, la médecine, le bien-être des soignants. Et il nous échappe d’autant plus que nous cherchons à le contrôler, à le rendre accessible. Aujourd’hui, le mal qui nous frappe révèle aussi que nous devons laisser l’hôpital imprévisible. Qu’en temps de paix, il doit rester naturellement généreux, en nombre, dispendieux, toujours prêt à envisager l’improbable. Que nous ne pouvons évidemment jamais prévoir. Bien sûr, il n’y aura peut-être plus de crises similaires avant vingt ans (crise des recrutements, conflits sociaux, défiance, épidémie).

Nous oublierons peut-être ces applaudissements aux fenêtres, tous les soirs à 20 h 00, pour soutenir les soignants. Nous reviendrons alors au monde d’avant, celui où notre désir était de rendre l’hôpital disponible, à disposition, réduit à l’activité de court terme. Ce sera alors certainement notre plus grande erreur pour ce début de siècle.